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vendredi 11 octobre 2013

Itinéraire bis

Ces temps-ci nous avons exploré les chemins de traverse, un peu par goût de l'aventure, parfois pour éviter les embouteillages, plus souvent pour observer des paysages dissimulés au regard des grands axes, et cela au dépend de tout esprit de performance, puisque nous targuons d'un Toulon-Toulouse (4h 30 par l'autoroute) d'une durée de 12h (en plein mois d’août certes, avec visite de musée et passage par des gorges profondes aussi, mais cela fit ricaner dans les chaumières tout de même).

En Indonésie la notion de temps étant bien différente, nous nous sommes lancés sans complexe dès que nous avons eu une voiture, sur les petites routes cahoteuses de Java, pleines de trous et de bosses, parfois même sans goudrons, traversant de superbes paysages en tremblant un peu pour les suspensions de notre vénérable tacot.



Après ça, tout récemment, je me réjouissais à Sumatra de la belle qualité de l'asphalte qui déroulait son long ruban presque sans accroc parmi les rizières, en sillonnant de paisibles campagnes dans une voiture de location. 


Une maison traditionnelle Minang, typique de Sumatra ouest.
Le chauffeur levait un premier sourcil inquiet sur cet itinéraire inconnu dicté par un GPS via mobile, et leva le deuxième de dépit quand finalement les lacets étroits ne furent plus recouverts que de rares plaques de bitumes éparses entre les pierres et les ornières où sa voiture cahotait en grinçant. A l'arrière, subjuguée par les harmonies de vert coordonnées par les paysans affairés dans les champs, je réprimais mes pulsions photographiques, ou je tentais de les assouvir par la fenêtre sans compliquer encore notre progression déjà sérieusement ralentie.







Elle allait même être stoppée car en haut d'un petit cirque un camion était arrêté, et depuis une bonne heure déjà:  des cantonniers étaient à l'oeuvre, damant doucement une épaisse couche noire et nauséabonde. 




En attendant, le chauffeur (en rouge) les conducteurs du camion et ma douce moitié (moustachue) papotent.

Pendant les allers et venues des engins, j'ai pu m'abandonner à l'observation de ce paysage enfin immobile.
Le buffle, animal emblématique de la culture Minang.


Abri improvisé pour les récoltes.



Public du balletcantonnier: les hommes d'un côté, les femmes de l'autre, à l'ancienne...
Après avoir enchaîné plusieurs vols et quelques trajets par la route depuis la France, posée devant ce tableau idéal de l'Indonésie champêtre, j'eus l'impression d'être arrivée, enfin.



Et, cerise sur le gâteau, juste avant de remonter en voiture, une des spectatrices de la valse lente des dameuses m'attrape par la manche et me présente sa petite fille qui enchaîne trois poses inattendues:


HOP!

ET HOP!


ET RE-HOP!

Manquaient plus que le collier de fleur et le yukulélé!
Selamat datang/ bienvenus!



dimanche 27 janvier 2013

La vie en vert

Le vert mériterait sa place sur le drapeau indonésien. 
Je ne sais pas encore pour quelles raisons il est rouge et blanc, mais s'il était vert cela s'expliquerait facilement.

Avant même de poser le pied en Indonésie, c'est le vert vif et clair de la végétation qui saute aux yeux depuis le hublot, dans la descente. Les pluies généreuses et la terre fertile de Java en font un jardin luxuriant, et les rizières partout éclairent le paysage de polygones parfois presque fluorescents. 


C'est aussi une couleur sainte en Islam, les mosquées sont donc souvent vertes, ou au moins en partie:

Grande mosquée de Cirebon
Les Wali Songo sont les 9 saints qui amenèrent l'Islam à Java

Ce vert des rizières murissantes me fascine, éphémère et printanier dans nos contrées, il est ici présent partout.


  

Témoin d'une nature vigoureuse, le "vert rizière" est à la mode ces temps-ci en Indonésie, et à mon grand étonnement de française habituée aux tons plus neutres en décoration, ce "vert pomme" est ici très utilisé.

 


En France, je n'ai vu qu'une seule fois une maison verte. Mais l'année suivante, elle était repeinte couleur coquille d'oeuf, ne conservant le vert que sur les huisseries. Sans doute les services de l'urbanisme, régissant en général de façon stricte les couleurs autorisées sur nos façades, ont-ils rappelé à l'ordre les propriétaires, ou bien ceux-ci sont-il rentrés dans la norme par eux-même, obéissant à l'idée communément répandue que le vert sur nos murs est défavorable au bien être domestique?

Dans l'autre hémisphère ce serait visiblement plutôt le contraire, les maisons  sont vertes à l'extérieur, mais aussi à l'intérieur:


                   

Les commerces sont souvent également verts:



Les transports aussi:





Les vertus de cette teinte énergique sont sans doute invoquées ici pour redonner jeunesse et vitalité à de vénérables véhicules.

Pourvu qu'à force de prendre du vert plein les yeux cela influe aussi sur nos métabolismes...

















samedi 7 juillet 2012

Tout l'or d'Ophir



Notre première étape est familiale. Deux ans après notre dernière visite en Indonésie, nous sommes allés directement à Sumatra Ouest, où vivent mes beaux parents, une des deux soeurs de mon mari et son frère, avec leurs petites familles. 


D'origine javanaise, mes beaux-parents sont allés s'installer à Sumatra il y a bientôt  30 ans, après une première carrière de mon beau-père dans l'armée, en suivant un programme gouvernemental, la "transmigrasi" qui visait à répartir la population indonésienne depuis l'île de Java, démographiquement congestionnée, à l'île de Sumatra, beaucoup moins peuplée, pour y cultiver des terres encore inexploitées. Il leur fut attribués deux hectares et  ils s'organisèrent en coopérative agricole avec les autres nouveaux arrivants autour d'une culture principale: le palmier à huile. 

Promenade dans la palmeraie

Une usine mise en place par le gouvernement achète la récolte de noix de palme à ces coopératives, en gardant un pourcentage pour remboursement des plantations. Autour des maisons, les jardins (5000m²), les "kebun",  sont voués à des cultures plus variées, selon le libre choix de leurs propriétaires. Les parents de Budi y ont planté des cacahuètes, du manioc, du maïs, puis du cacao, mais une maladie décime actuellement les cacaotiers (?) ils seront donc bientôt remplacés par du maïs.... transgénique. C'est ce que Budi, mon mari, a compris en parlant avec son papa, il lui a conseillé de se tourner vers des variétés plus anciennes.


On connait en France la mauvaise réputation de l'huile de palme, dont la culture intensive et galopante dévaste les forêts vierges indonésiennes, dont la qualité nutritive est très contestée, elle envahit tous les produits de consommation et beaucoup de consciences s'élèvent contre ce produit jusqu'à le diaboliser.

J'ai vu là-bas un visage aimable de la culture de la noix de palme, qui a fait de ces forêts une campagne cultivée traversée de rivières, où des maisons en bois pour certaines ou en dur pour d'autres, entourées de jardins luxuriants longent des chemins plus ou moins cahotiques, où toute une population de paysans et de marchands prospèrent grâce au fruit d'un travail patient. 




Il est de bon ton de s'offusquer de la déforestation et de la scandaleuse cupidité des sociétés productrices d'huile de palme, et je partage l'affliction des amoureux de la nature,  mais la réalité du terrain ouvre d'autres pistes de compréhension. La prise de conscience des effets dévastateurs de cette culture intensive est assez récente, et il faut rappeler que l'introduction du palmier à huile en Indonésie incombe aux colons hollandais au XIXème siècle. Une partie du monde occidental déplore les degâts de cette culture, mais il est aussi un consommateur vorace de son produit. 

 S'il appartient au gouvernement indonésien de contrôler l'aménagement de son territoire, il est de sa responsabilité de favoriser la prospérité de sa population. Et la noix de palme n'enrichit pas que les grandes sociétés. Là où la culture céréalière ( non moins dévastatrice pour les terres européennes) emploie un ou deux fermiers pour des centaines d'hectares, l'organisation du travail agricole en Indonésie procure de l'emploi à des centaines de gens.



La critique des choix politiques du gouvernement indonésien est même perçue par certains ici comme une tentative de freiner l’ascension d'un pays émergent de la part de pays plus anciennement développés... et qui ont  depuis longtemps déjà établi leur richesse au détriment de la vie sauvage.

Le quartier de Pasaman où nous étions s'apelle Ophir. Ida Pfeiffer, une intrépide exploratrice autrichienne passa par là vers 1850 et nota l'analogie avec les légendaires mines du Roi Salomon. Je doute que les richesses actuelles de ce quartier ne satisfassent les goûts de luxe du roi Salomon ou même de chefs d'états plus récents et "bling bling", mais elles sont perçues par ses habitants comme une bénédiction, via la culture du "kelapa sawit".